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Changement de cap

Mercredi 12/08/2005

vendredi 12 août 2005, par Dridjo

Il faut comme l’ail, se fondre dans le potage de son nouveau bonheur tout en gardant la force de la senteur de ses souffrances passées mais ne pas se perdre comme un morceau de sucre dans un bocal de miel.

Vous savez ce qui es le plus difficile à faire dans la vie ? Mener des combats quand on a pas la rage. La rage au cœur, la rage au ventre, la rage où vous voulez et l’envie. On dit souvent que les anciens pauvres ont un comportement de nouveaux riches (pléonasme singulier de la langue française) pour souligner le fait qu’ils ont tendance " à en faire trop ".

Mais es-ce de leur faute s’ils ont perdu la rage qui leur permettait d’avoir des principes angéliques pleins la tête ? La rage qui leur faisait dire " si j’étais riche je distribuerait toute ma fortune par monts et par vaux afin que personne plus ne souffre de la faim autant que moi j’en ai souffert " a disparu avec la faim qui les tenaillait. Les principes de partage, de droits sociaux ont pris la poudre d’escampette quand l’ancien fraudeur du métro à troqué son sandwich jambon-beurre fait maison par le " petit repas léger " que constitue 350g de bœuf pour le déjeuner de midi. L’ancien ouvrier smicard qui prend conscience que son million gagné au loto sera défalqué des 50% de l’ISF (Impôt Sur la Fortune) devrait-il se sentir coupable de troquer sa carte de membre de Force Ouvrière contre un " Pass " au Country Club avec accès illimité au Green du MEDEF ?

Que voulez-vous que l’ancien rappeur de Sarcelles mette dans ses textes quand depuis 3 ans il ne partage plus son " lit d’amour " situé dans la cave de l’HLM le moins pourri de la sité avec les rats ; que les flics de la BAC lui donne du " merci monsieur " en recevant leur autographe au lieu du " couche toi sur le sol ! ! " en donnant des coups de rangers ?

Comment ne pas comprendre que l’ancien esclave rejette la responsabilité son histoire douloureuse sur ceux qui sont resté dans la famine et la guerre quand de son malheur est finalement sorti un chalet dans les montagnes de l’Ohio ou un bout de plage bordé de cocotier en Martinique ?

Même son entourage jette à la face de l’ancien " galéreur " son état de nouveau participant au banquet de la vie. Le retour " d’ amitiés " que l’on voyait inexorablement s’éloigner du fond du gouffre dans lequel il se trouvait. Le banquier qui vous accueille avec un sourire concupiscent et relent carnassier qui a remplacé le rictus dégoûté et condescendant que l’on réservait son RMI mensuel. Ces donzelles jadis inaccessibles qui aujourd’hui découvre un néo-crésus au charme et à l’humour dévastateur. Les comportements changent, les attitudes évoluent vers plus de sympathie, plus de légèreté.

Tout cela montre que ce n’es pas seulement l’homo-sapiens qui a décidé de muer un jour, mais ce sont les changements environnementaux qui ont aussi initiés sa mutation. Un étalon qui vivrait au milieu d’un troupeau de zèbre devra se parer de zébrures afin de s’intégrer à son nouveau contexte au risque de se voir exclu. Mais sa nature de cheval ne se perdra pas. La légèreté, l’insouciance de l’heureux spéléologue qui sort d’un gouffre aux parois glissantes, pentues et coupantes ; ne saurais prendre le pas sur la gravité, le sentiment d’être concerné, l’envie de lumière ; bref la rage qui était sienne et qui s’étiole comme beurre au soleil mais qui reste forte, vivace chez tous ceux à qui il tend la corde qui mène à la lumière.

Il faut comme l’ail, se fondre dans le potage de son nouveau bonheur tout en gardant la force de la senteur de ses souffrances passées mais ne pas se perdre comme un morceau de sucre dans un bocal de miel.